mercredi 29 janvier 2014

L'ANCIEN COUVENT DES MINIMES A DECIZE

L'ancien couvent des Minimes
                                             de Decize.

L'histoire très complète d'un monument de Decize.

 




I - Le prieuré bénédictin Saint-Pierre.

Vers 1026, Landri, premier comte héréditaire de Nevers, cède aux moines bénédictins de l'abbaye Saint-Germain d'Auxerre des terrains sur lesquels ils vont bâtir un prieuré. Renaud, second comte de Nevers et fils de Landri, confirme ce don par une charte en 1032.

La construction des bâtiments abbatiaux se fait dans la seconde moitié du XIe siècle et le XIIe siècle. De ce prieuré bénédictin, il reste le plan d'ensemble des bâtiments, les soubassements, le clocher et une partie du choeur roman de l'ancienne église.
Le 5 des ides de février 1151 1, une bulle du pape Eugène III précise les droits de dîmes des religieux du prieuré Saint-Pierre et leur accorde la nomination des curés de plusieurs paroisses des environs: Sainte-Marie de Brain, Saint-Maurice, Saint-Léger et Saint-Martin de Druy.
A partir de 1445, plusieurs documents rappellent que le prieur de Saint-Pierre a le droit de basse-justice sur les habitants de plusieurs paroisses soumises à sa dîme.


                Détail de sculpture romane, pierre de réemploi.

 
On connaît assez mal la présence bénédictine à Decize. Combien étaient-ils ? Sans doute un tout petit nombre. Les constructions imposantes, la superficie de l'enclos du prieuré et les revenus importants (fermes, rentes et dîmes) tendent à prouver que les bénédictins ont bénéficié d'avantages multiples concédés par les comtes de Nevers, par les échevins de Decize et les seigneurs des paroisses voisines. Le dernier prieur commendataire, Claude de Damas, issu d'une puissante famille du Nivernais, n'a sans doute pas négligé les ressources du couvent.
Toutefois, Jean Hanoteau mentionne des difficultés passagères : en 1370, le prieuré ne peut payer une redevance due à l'évêque de Nevers 2.
Quoi qu'il en soit, les bénédictins ont, semble-t-il, délaissé leur prieuré de Decize aux XVe et XVIe siècle. Le grand incendie qui a ravagé Decize en 1559 n'a pas épargné l'église et les bâtiments claustraux. On distingue plusieurs pierres marquées par le feu, dans les parties inférieures de l'ancienne église. Au début du XVIIe siècle, le prieuré Saint-Pïerre était à l'abandon.




 






                           Le cloître.


II - Les Minimes appelés à Decize.
Les Minimes, ou Ermites de saint François (sous-ordre des Franciscains), ont été institués en 1435 dans le sud de l'Italie par saint François de Paule (1416-1507). L'ermite de Calabre était venu à Plessis-lez-Tours afin de soigner le roi Louis XI et l'assister dans son agonie, puis il s'était établi en Touraine et il avait acquis une très grande réputation parmi les Français.
Dans le grand courant de la Contre-Réforme qui suit le Concile de Trente, les Minimes, moines prédicateurs, sont appelés dans le Nivernais afin de lutter contre le protestantisme. Ils sont déjà installés à Nevers lorsque les échevins de Decize leur conseillent de venir en leur ville "pour le bien commun des habitans de cette ville et lieux circonvoisins où se retrouvent quelques uns faisant profession de la religion prétendue réformée." Ils pourront s'établir dans un ensemble conventuel que les Bénédictins sont prêts à leur céder, le prieuré Saint-Pierre. "Au moyen du catéchisme, des prédications et autres saints et pieux exercices", ils doivent venir à bout des petites communautés protestantes qui subsistent dans le sud du Nivernais.
Le 23 mai 1621, les échevins et les principaux habitants de Decize délibèrent sur l'établissement des RR. PP. Minimes. Dans un premier temps, on leur cède la Maison du Sacristain, un petit bâtiment qui jouxte le prieuré (au lieu-dit le Car-Tarault, ou Cartarot), acheté 107 livres à Lucas Mignault. La municipalité de Decize octroie aux Minimes une rente de 600 livres tournois, à condition qu'ils prêchent dans l'église Saint-Aré neuf fois par an (grand-messes de la Purification, de l'Ascension, de Saint-Aré, de la Nativité, de la Pentecôte, de l'Assomption, de la Trinité, de la Fête-Dieu et de la Toussaint). Un premier contrat entre la ville et les Minimes est passé devant le notaire Pasquier dès le lendemain de cette délibération. Le 4 octobre 1621, le supérieur du couvent de Nevers vient prendre possession des premiers locaux 3.
Le long transfert du prieuré,
                           d'un ordre religieux à l'autre.
Les religieux Minimes doivent ensuite obtenir toute une série d'autorisations. En juillet 1622, le roi Louis XIII approuve la cession du prieuré par lettres patentes données à Tonneins ; le duc de Nivernais, l'évêque de Nevers, l'abbé de Saint-Germain d'Auxerre approuvent également. Cinq religieux arrivent à Decize, accompagnés par le R.P. Dupré, provincial de France. Maître Contamine, notaire, enregistre l'installation du R.P. Nicolas de La Croix, premier prieur des Minimes de Decize. Le procureur fiscal verse la première rente.
Ces autorisations sont suivies, pendant encore près de vingt ans, par des démarches complexes. Une ordonnance approuve la cession par les Bénédictins du prieuré aux Minimes; le bureau des finances de Moulins enregistre cette cession le 7 octobre 1622 ; le pape Urbain XIII, le Parlement de Paris, le duc de Nevers sont consultés et donnent leur accord. Il reste à céder les multiples droits et dépendances attachés au couvent. Le dernier prieur titulaire, Claude de Damas, est dédommagé. Le 23 juin 1624, sont prononcés officiellement "désunion, démembrement, extinction et suppression du prieuré bénédictin". Les Minimes rembourseront encore 4000 livres à la famille de Damas en 1668.
La cession d'un prieuré entre deux ordres religieux est avant tout une importante affaire commerciale. L'inventaire des biens et droits du couvent établi en 1790 est impressionnant ; la fortune des Minimes, évaluée autour de 400 000 livres à cette époque, n'a pas été bâtie seulement depuis 1622. La plupart des dîmes, des bordelages, des rentes, des fondations, le monopole des fours banaux, plusieurs domaines agricoles avaient été transférés des Bénédictins aux Minimes.
La reconstruction du couvent.
Les Minimes, nouveaux possesseurs du prieuré Saint-Pierre, doivent entièrement rebâtir leur couvent, d'autant plus que, le 17 juin 1626, la nef de l'église s'écroule. Seuls le clocher et le choeur subsistent de l'édifice roman. Le notaire Jacques Pasquier avait déjà dressé, quelque temps auparavant, un procès-verbal inquiétant de l'état du prieuré : les portes restaient ouvertes jour et nuit ; la volaille, les chiens, les chats et les petits enfants circulaient librement dans l'église ; les autels étaient recouverts de paille et de détritus ; les châsses renfermant les reliques de trois saints étaient grandes ouvertes depuis qu'un forcené les avait renversées...
Le nombre de religieux s'accroît. Pour financer les travaux, ils vendent les arbres qui couvrent 300 arpents de l'immense forêt qui leur a été léguée par les Bénédictins (désormais elle est appelée forêt des Minimes). Des arbres que François Boucheroux, seigneur des Maretz, demeurant à Orléans, leur paie 18000 livres et qu'il fait livrer en aval.
Des équipes de maçons s'affairent pour réparer le couvent et bâtir une nouvelle nef, plus large. Cette nef est éclairée par de grandes baies ogivales. Elle est surélevée par rapport au transept. Assez rapidement, l'ancien choeur roman est délaissé et sert de sacristie ; des estrades et des cloisons de planches sont érigées dans le transept. Les stalles des religieux entourent le maître-autel. Une seconde séparation, grillagée ou matérialisée par une grille, isole les moines de la nef, dans laquelle les habitants de la ville peuvent se tenir pendant les offices.







 
 





Le 12 août 1643, un acte notarié donne la liste des moines : le prieur se nomme Gilles Cossard, il est entouré des pères Nicolas Flémon, Bernard Pignier, Bernard Prévost, Pierre Lefebvre, Pierre Aprest, Nicolas Saller, Joseph Fargue et Pierre Priart.
Le 23 novembre 1650, le roi Louis XIV exempte le couvent du logement des gens de guerre. "Sa Majesté fait deffense à tous chefs et officiers commandants et conduisants les gens de guerre de quelque nation et qualité qu'ils soient de loger ny souffrir qu'ils soient logé aucun de ceux qui sont sous leurs charges, dans le convent, maisons, four banal et lieux en dépendants." Cette lettre de sauvegarde est réitérée le 19 décembre 1656 : le roi "permet auxdits Religieux de mettre les armoiries de sa Majesté, panonceaux et batons royaux en tels endroits et advenues des dittes maisons et métairies." L'écusson portant les armes royales est apposé sur la façade. Il est entouré par deux autres écussons : à droite les armes de Charles de Gonzague (entourées du grand collier de l'ordre de la Rédemption, fondé à Mantoue) et à gauche trois clefs rappelant que l'ancien prieuré a été consacré à saint Pierre 4.
Le couvent est terminé en juin 1669. Mgr Vallot, évêque de Nevers, vient le bénir et "confirmer pendant deux jours de suite un grand nombre d'hommes, de femmes et d'enfants".
La dispersion des Minimes.
En 1790 les six derniers Minimes, Jean Sionnest, Jean-Joseph Gaudry, Joseph Gaudot, Guillaume Pajot, Jean-Baptiste Masclet et Nicolas Desvignes sont réduits à l'état laïc. Leurs livres de comptes sont épluchés par l'administration nouvelle de la commune et du district, qui est venue installer ses bureaux dans le ci-devant couvent.
Leur revenu total pour l'année 1789 est établi à 13898 livres 17 sols et 9 deniers, sans compter les redevances en nature. Si l'on ôte les charges et dettes à rembourser, les religieux ont dépensé en 1789 5000 livres, soit moins de 1000 livres par individu, une somme qui est inférieure aux 1500 livres du salaire promis par l'Assemblée Nationale aux prêtres fonctionnaires. Mais, les Minimes restent propriétaires de ces immenses richesses qui frappent l'imagination des Decizois, et qui sont devenus biens nationaux.
On met en adjudication les domaines agricoles. La Guédine vaut 12452 livres, les Valettes 18000 livres, la Meulle 19500 livres, les coupes de bois 182211 livres...



                           Plan terrier pour les Minimes, 18e siècle.

 
III - Les utilisations successives des bâtiments.
Pendant la Révolution, les nouvelles autorités municipales de Decize dispersent les biens agricoles, forestiers et industriels des ci-devant moines mais elles ne vendent pas les bâtiments du couvent.
L'ancien couvent devient pour deux décennies une sorte de centre administratif : les bureaux de la municipalité et du district, le tribunal et la prison s'y installent. L'église est transformée en salle de réunions, où se tiennent les élections, les réunions patriotiques. Plusieurs fonctionnaires avec leurs familles sont logés dans les étages.
Les bâtiments se dégradent ; il faut réparer plusieurs toits, renforcer un mur de soutènement. Le clocher et l'arête du toit de l'église ont souffert en Brumaire an II, lors de la dépose des quatre cloches. Le 15 Frimaire suivant, l'entreprise Ducaroy est chargée de démonter une partie du clocher, d'édifier une nouvelle charpente et de couvrir la tour. C'est alors que le clocher perd le bulbe qui lesurmontait depuis la reconstruction du XVIIe siècle et retrouve une structure plus proche de l'architecture romane. L'église est couverte d'ardoises neuves.
Après plusieurs réparations onéreuses, l'administration décide de vendre l'ancien couvent des Minimes. La vente aux enchères se passe à la préfecture de Nevers. A l'extinction du troisième feu, le citoyen Claude-Marie Raboué, seul enchérisseur, commerçant à Decize, devient propriétaire du couvent pour la somme de 8000 francs. Le paiement est effectué trois ans plus tard : le 2 avril 1811, la quittance est signée par le sénateur Chaptal, comte de Chanteloup, trésorier du Sénat.
Cette propriété est transmise par héritage à la famille Hanoteau.
Le café Bellevue.
Depuis leur vente à Claude-Marie Raboué, la majeure partie des locaux est louée. Des logements ont été aménagés dans les étages. Au rez-de-chaussée, les deux grandes salles qui avaient auparavant servi de salle d'audience et de greffe du tribunal, ont été décorées en stuc et ont abrité le café Bellevue. Cette décoration mêle des faisceaux d'armes, bien dans le goût de l'époque, des motifs fantaisistes et un ensemble d'outils (qui peuvent être interprétés comme des symboles maçonniques 5).



                                               Décor en stuc.

 
Ce café a été le lieu de rencontre à la mode de la bourgeoisie decizoise, du moins pendant quelques années. Puis il a périclité. Un visiteur, l'industriel Hippolyte Guérin en fait une description assez critique :
"Au faîte aigu d'une ruelle à pic,
J'avise un grand couvent décoré d'une enseigne,
Où je lis (excusez si l'orthographe en saigne !)
Peint en cinq lettres d'or amorçant le public,
Le mot CAFFE... Voilà ce qui révèle,
De par saint Guttemberg et sa presse immortelle,
L'art compris largement et non pas ric-à-ric !''


L'école des Frères Maristes.
 
Le 27 octobre 1859, un partage par devant maître Gabriel Breton a lieu entre les deux fils de Jeanne Marie Raboué et de feu Charles Constance Hanoteau : le chef de bataillon du génie (et futur général) Louis Joseph Adolphe Hanoteau, et son frère, le peintre Hector Hanoteau. C'est le militaire qui hérite du clos des Minimes.
Depuis 1853, le curé Henry Deplaye a fait venir à Decize plusieurs religieux maristes qui tiennent une petite école dans l'actuelle rue Carnot. Ils sont à l'étroit. C'est pourquoi se constitue la Société Notre-Dame des Minimes, dont les principaux actionnaires sont la comtesse Du Prat, Guillaume Boigues et plusieurs notables de Decize. Cette société loue d'abord, puis achète en 1860 l'ancien couvent à Louis Joseph Adolphe Hanoteau, qui est alors commandant du Cercle de Draâ-el-Mizan, en Algérie.
A la rentrée de 1855, les frères maristes et leurs 55 élèves emménagent dans les grandes salles du rez-de-chaussée. L'école est complétée par un internat et l'effectif dépasse rapidement 140 élèves. Cette école privée va durer un peu plus de cent ans. Elle ferme en 1967.














 
 








Cette période est marquée par plusieurs modifications architecturales. Le choeur et le transept de l'église sont séparés de la nef par un mur de briques ; ils servent de chapelle aux frères maristes et à leurs élèves. La nef abrite les activités de patronage de la paroisse et accueille régulièrement des représentations théâtrales et des concerts ; le musicien Gabriel Monnot y invite plusieurs jeunes talents, dont sa fille Marguerite.
L’Hôpital Militaire des Minimes.
Durant la Première Guerre mondiale, le comte Etienne de Dreux-Brézé, propriétaire des locaux de l'école privée, et président de la Croix-Rouge de Decize, installe aux Minimes un hôpital militaire auxiliaire. Les élèves internes de l'école des frères sont logés en ville et au Château de Germancy, ce qui libère deux dortoirs.
En novembre 1915, l'hôpital auxiliaire n°3 peut accueillir 110 malades ; avec l'ouverture de deux annexes, il en reçoit jusqu'à 126. La grande salle du patronage héberge les soldats en convalescence ; des spectacles et des conférences de soutien à la Croix-Rouge s'y tiennent régulièrement.
Pendant la durée du conflit, 2214 blessés et malades ont été soignés aux Minimes. Le total des journées d'hospitalisation s'est élevé à 93597. Il n'y eut que douze décès.
En récompense de leur travail, les infirmiers et infirmières bénévoles ont reçu des diplômes et insignes de la Croix-Rouge. La médaille de la Reconnaissance Française a été décernée au comte et à la comtesse de Dreux-Brézé. Ces généreux donateurs ont été enterrés dans la chapelle de l’école.
Le cinéma Rex et l'incendie de 1979.
Au cours des années d'après-guerre, la grande salle des Minimes est parfois transformée en cinéma pour divertir les jeunes du Cercle Saint-Aré.
A partir d'avril 1937, le Cinéma Paroissial des Minimes joue chaque dimanche, à dix-sept heures. « C'est simple et c'est moral. on repart avec de la joie, de l'émotion saine et un peu plus d'idéal dans le coeur 6. » Le prix est modique : un franc. Le 6 février 1938, a lieu l'inauguration d'une salle « rajeunie et élégante, aménagée pour l'acoustique ». Quatre séances hebdomadaires sont prévues (vendredi et samedi à 20 h 45, dimanche à 16 h et 20 h 45). Le Cinéma des Minimes est désormais le concurrent du cinéma Mondial.
Pendant le second conflit mondial, l’abbé Parent, vicaire de la paroisse, inscrit le cinéma des Minimes à l’Amicale des OEuvres, une fédération de patronages nivernais. Le cinéma va changer de nom pour devenir le Rex.
En 1957, la cabine de projection est modernisée selon les normes de sécurité de l’époque. Le cinéma Rex de Decize est géré par le Rex de Nevers (dirigé par l’abbé Bonin). M. Elie Poulard est nommé projectionniste et responsable de la salle. Le Rex joue six jours sur sept, avec deux séances le jeudi et trois le samedi. Dans les années 1970 s’ajoutent un Ciné-Club et quelques séances de Connaissances du Monde.
La fréquentation hebdomadaire moyenne est de 300 à 400 spectateurs. Le maximum est de 1200 spectateurs. Les grands succès sont Ben Hur, Les Raisins de la Colère, Quand passent les cigognes, La Belle des Belles, Mon Oncle, Le Roi de coeur, La Grande Illusion, Il était une fois dans l’Ouest, King-Kong, Diabolo-Menthe… 7
Le Rex n’a plus de concurrent à Decize car le Cinéma Mondial a fermé en 1969.
Le 26 juin 1977, une association nommée l’AGECIREX est fondée à Decize dans le but de relancer la fréquentation du cinéma - concurrencé par la télévision - et de moderniser la salle. La commune de Decize participe au financement. Au programme de la saison 1978-1979, il y a des succès récents : Le Crabe-Tambour, La Fièvre du samedi soir, L’Amour violé…
Le samedi 24 et le dimanche 25 novembre 1979, on joue le film Hair. Pour la semaine suivante, le projectionniste avait prévu La Tour infernale
”Le cinéma de Decize entièrement détruit par un incendie. Le feu s’est communiqué à un entrepôt voisin. Les dégâts sont considérables.
Dans la nuit de mercredi [28] à jeudi [29 novembre 1979], un incendie d’une rare violence éclatait à Decize. Lorsque les trois coups de la sirène retentirent sur la ville endormie, vers 1 h 30 du matin, le sinistre avait déjà pris des proportions très inquiétantes.
Dans un bâtiment du Couvent des Minimes, le cinéma Rex était la proie des flammes, et déjà plus rien ne pouvait être fait pour le sauver lorsque l’alerte fut donnée.
Le cinéma Rex était installé dans l’ancienne église du Couvent des Minimes qui avait été refaite au XVIIe siècle. Ce bâtiment très imposant bénéficiait d’une formidable charpente en châtaignier, véritable oeuvre d’art en elle-même.
C’est non seulement l’unique salle de cinéma de Decize qui disparaît mais, avec elle, un ouvrage d’art.
De tout cela il ne reste que les murs et encore l’immense pignon triangulaire a beaucoup souffert et se trouve lézardé. L’accès aux alentours en est d’ailleurs interdit au public. Les flammes n’ont rien épargné, sauf les deux films qui se trouvaient dans la salle de projection. Dans les sièges, dans le plancher, le plafond et la charpente, le feu a trouvé un combustible idéal. Fort heureusement, ce sinistre n’a fait aucune victime .”





 
La restauration et la réaffectation des locaux.
La ville de Decize s'était rendue acquéreur de l'ancien couvent en 1975. Les bâtiments étaient en mauvais état et plusieurs années d'inutilisation n'ont fait qu'amplifier leur dégradation.
L'incendie de novembre 1979 précipite les travaux de restauration et il permet de rendre à l'ancienne église, au cloître et à la cour un aspect plus proche de leurs fonctions premières.
Le 3 mars 1981, le conseil municipal de Decize décide de reconstruire la partie sinistrée des Minimes. Sous le contrôle de M. Collette, architecte départemental des Monuments Historiques, les travaux se déroulent jusqu'en 1984. La charpente et la toiture de l'église sont rétablies, les murs sont grattés et recrépis, des pierres sont taillées et placées à la place d'éléments trop friables ou incomplets, de nombreux ajouts parasites sont enlevés.
Que faire de l'ancien couvent ? Plusieurs options se présentent alors. Certains Decizois souhaitent y établir un centre culturel, un musée, des salles de réunion pour les nombreuses associations. Le choix de la municipalité est différent : dans les locaux habitables, il y aura une maison de retraite et l'ancienne église restaurée est réservée aux expositions artistiques et aux concerts 8.





 
La maison de retraite ouvre en 1989. Deux associations gèrent successivement cet établissement qui parvient difficilement à boucler un budget en équilibre. En 2004, le foyer-résidence de personnages âgées ferme et les locaux sont transférés à l'Hôpital Spécialisé de La Charité.
Sept ans plus tard, l'ancien couvent des Minimes est à vendre...
La salle Olga Olby.
L'ancienne nef de l'église, débarrassée des aménagements modernes du cinéma, a repris un aspect qu'elle devait avoir autrefois. Propriété communale, c'est une salle d'expositions, utilisée par le Cercle Artistique de Decize, par des artistes invités, par des associations locales. Le public vient y entendre des concerts et des pièces de théâtres.
Cette salle a reçu le nom d'Olga Olby.






 






Tableau d'Olga Olby.





                                                     Olga Olby.


Olga Hrschanovskaia est née le 14 avril 1900 à Kichinev (dans la province russe de Bessarabie, actuellement Chisinau, capitale de la République de Moldavie). Ses parents sont venus de Pologne. En 1919, elle entre à l'Académie des Beaux-Arts de Kichinev. Elle étudie ensuite à Bucarest, à Berlin, puis elle s'installe à Paris. Elle prend le pseudonyme d'Olga Olby.
En 1924 elle acquiert la nationalité française. Elle épouse le docteur Yves Dommartin et s'établit dans le Nivernais. Plusieurs de ses toiles sont exposées dans les galeries parisiennes.
Olga Olby décore l'église de Saint-Léger-des-Vignes (1950-1953). Elle expose régulièrement dans les grands salons internationaux. En 1973, elle s'installe en Bretagne. Elle décède en 1990. Ses oeuvres ont été léguées en partie à la ville de Decize 9.
                              (Pierre Volut).



1 Le calendrier romain julien, repris par le premier calendrier chrétien, utilisait toujours la division romaine traditionnelle de chaque mois (ides, nones et calendes, avec décompte des jours avant ces trois repères). Les ides de février étaient le 13e jour du mois.

2 Jean Hanoteau, Guide de Decize, p. 77 et sq. ; et discours, Association amicale des Anciens Elèves du Pensionnat N.D. des Minimes, 1931, p. 15-26.

3 Cf. Inventaire des titres des Minimes de Saint-Pierre de Decize, A.D.N. cote H 274. Ce document, très complet et rédigé d'une façon très lisible regroupe plusieurs centaines d'informations capitales sur les Minimes de Decize.

4 Ces écussons ont été copiés et remplacés au début du XXe siècle, lorsque le comte de Dreux-Brézé a fait restaurer la grande baie vitrée de la façade. Mais la pierre très friable n'a pas résisté aux intempéries ni à l'incendie de 1979.

5 Aucun document ne prouve qu'il y ait eu une loge maçonnique à Decize au XIXe siècle. Le propriétaire du Café Bellevue était peut-être influencé par les représentations symboliques du compagnonnage.

6 Publicité parue dans la revue paroissiale Tous Frères à Decize et Saint-Léger, n°3, avril 1937.

7 Renseignements fournis par M. Elie Poulard.

8 Séance du conseil municipal du 19 mars 1984.

9 Ce don est accepté lors de la séance du conseil municipal du 2 mars 1982. Des sculptures de l’artiste Lydia Luzanowsky font partie de ce legs.

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